Mes 5 conseils pour bien observer les animaux

Depuis 25 ans, j’observe la faune sauvage. Depuis 10 ans, cette activité constitue le cœur de mon métier. Observer dans la nature est une activité à la fois agréable et exigeante. Voici mes conseils pour réussir vos « sorties », c’est à dire pour faire des observations intéressantes et progresser dans la connaissance de la nature.

Conseil n°1 : du temps plutôt que du matériel

La chose la plus importante pour observer la nature est d’avoir du temps. Si vous êtes débutant, comptez au minimum deux heures par sortie. Il faut en effet un peu de temps pour se familiariser avec un site, pour « s’immerger » dans la nature, se mettre à l’écoute des bruits… Nos sens ne sont pas immédiatement opérationnels, surtout si nous sortons d’une voiture ou d’un intérieur bruyant. Généralement, les premières minutes constituent une sorte d’échauffement ! Le plus vous passerez de temps sur un site en étant calme et attentif, le plus vous ferrez d’observations. Dans une certaine mesure, les animaux s’habituent à votre présence si vous vous déplacez peu et lentement.

Quant au matériel, l’image du naturaliste sur-équipé et camouflé est caricaturale*. Je vous conseille au contraire d’être léger. L’équipement de base est constitué de bottes (indispensables), d’une paire de jumelles légères (type 8×42) et d’une ceinture de type « porte-outils » pour mettre un carnet de notes, une carte, un crayon et si possible un appareil photo numérique. Cet appareil peut être petit mais doit avoir un bon zoom (x 30 par exemple) sans quoi vos photos ne vous aideront pas pour la détermination des espèces.

* elle correspond surtout au photographe animalier dont l’activité est assez différente et nécessite beaucoup plus de matériel


Conseil n°2 : connaître son territoire

Certains se déplacent spécialement à l’autre bout de la France ou dans des pays exotiques pour faire de « belles » observations. Je suis plutôt partisan de faire l’inverse : fréquentez régulièrement les trois ou quatre mêmes sites vous fera progresser davantage. En effet, vous pourrez vous rendre compte des variations saisonnières : plumage des oiseaux, émergence des insectes, différentes phases de développement des batraciens, passage des oiseaux migrateurs… Par ailleurs, c’est en observant longuement et de manière répétée une même espèce que l’on pourra plus tard l’identifier « au premier coup d’œil ». Courir les meilleurs « spots » de France ou d’Europe ne fera pas de vous un bon naturaliste… mais probablement un naturaliste blasé ! Il faut particulièrement conseiller aux enfants d’observer dans leur jardin ou dans un parc où ils peuvent se rendre régulièrement. En grandissant, ils pourront étendre progressivement la zone qu’ils prospectent : commune, département, etc.


Conseil n°3 : alterner observation rapprochée et observation large

Voici un conseil qui devrait vous permettre d’observer un maximum d’espèces sans vous épuiser : observer tantôt tout près de vous, en marchant très lentement, par exemple le long d’une haie ou d’un talus, et tantôt à une plus grande distance, sans oublier de scruter de temps à autre le ciel, en marchant d’un bon pas. La prospection rapprochée vous permettra de repérer les insectes, les reptiles et les batraciens. La prospection large est idéale pour les oiseaux ou les grands mammifères. De plus, elle vous permettra de vous détendre et d’analyser le paysage. Vous ne pouvez en effet pas maintenir votre concentration de prospection rapprochée pendant des heures d’affilée. Enfin, quelque soit votre mode de prospection, gardez les oreilles bien ouvertes ! Les oiseaux mais aussi les grenouilles ou les orthoptères (sauterelles, criquets…) se reconnaissent bien souvent à leur chant.

Vous l’aurez compris, je suggère à chaque sortie d’observer toutes les espèces possibles plutôt que de vous concentrer sur un groupe (oiseau, insecte…) en particulier. Vous comprendrez ainsi mieux les interactions entre les espèces et leurs liens avec le milieu. Cela diminuera aussi votre risque de faire « choux blanc » !


Conseil n°4 : les livres… avant le terrain !

Ce conseil s’applique notamment aux enfants. On a souvent l’image du naturaliste qui, ayant une espèce sous les yeux, sort de son sac le guide qui va lui permettre d’identifier l’animal… Je vous conseille de procéder dans l’ordre inverse : commencez par lire avant de sortir. Si la météo est trop mauvaise pour aller sur le terrain, profitez-en pour feuilleter vos guides naturalistes. D’une part, cela vous stimulera : toutes ces espèces à découvrir, n’est-ce pas merveilleux ?

D’autre part, mieux vaut avoir une idée de ce qu’il faut regarder, où et quand. Quel détails permettent de distinguer la Buse variable de la Bondrée apivore ? Quels critères d’identification faut-il noter sur un Azuré ? A quelle période ai-je des chances de trouver des pontes de Grenouille agile dans les mares ? En un mot : cherchez en pratique ce que vous connaissez en théorie !


Conseil n°5 : être généraliste… et humble !

Ce dernier conseil dépasse le cadre des observations naturalistes. Dans notre époque de surenchère technique où l’on trouve des « spécialistes » de tout, il me paraît plus intéressant de chercher à être généraliste. Ce qui nous manque le plus est la connaissance des territoires dans leur ensemble : leur faune, leur flore, mais aussi leur géologie et leur climat, les pratiques agricoles et sylvicoles, les matériaux de construction, les modes de chasse et de pêche, etc. Un peu d’Histoire et beaucoup de Géographie ne peuvent pas nuire au naturaliste !

Je terminerai par ce conseil qui m’a été donné lorsque, enfant, je faisais mes premières « sorties » dans un groupe ornithologique de la région parisienne : « Toute observation est digne d’intérêt » . Il faut en effet savoir rester humble et reconnaître que même l’espèce la plus banale garde une grande part de mystère… Il faut aussi pouvoir transmettre à nos enfants ces connaissances. Pour cela, nous devons conserver la possibilité de nous intéresser (à nouveau !) aux espèces les plus communes.

Photos : Émilien Barussaud


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