Des oiseaux (vivants !) au pied des éoliennes

Parmi les nombreuses études menées sur les interactions entre éoliennes et avifaune, la plupart concernent la mortalité provoquée par la collision des oiseaux avec les pales. Bien plus rares sont les études qui portent sur l’effarouchement des oiseaux par les éoliennes. Les oiseaux désertent-ils les sites où sont construits les parcs éoliens ? Voici quelques éléments de réponse, issus de notre expérience de terrain en Bretagne.

Le cortège des espèces rurales

Notons tout d’abord que les parcs éoliens – tout du moins en Bretagne – sont généralement implantés dans des milieux agricoles, souvent marqués par le remembrement et d’un intérêt limité pour les oiseaux. Ajoutons que les études d’impact, préalables à la construction des parcs éoliens, permettent d’éviter les secteurs le plus sensibles en termes d’avifaune. Les éoliennes sont donc le plus souvent installées dans des parcelles cultivées, souvent bordées de haies, parfois entrecoupées de petits boisements.

Les espèces associées à ces milieux sont pour la plupart communes mais présentent une certaine variété : les petits passereaux sont les plus abondants (sylvidés, fringillidés, turdidés), mais on trouve également dans ces paysages des rapaces (Buse variable, Faucon crécerelle), des pics, des corvidés et, parmi les hivernants, des limicoles (Vanneau huppé, Pluvier doré) et des laridés (Mouette rieuse, Goélands). Au total, une cinquantaine d’espèces sont susceptibles de fréquenter ces milieux agricoles ouverts ou semi-ouverts, auxquelles peuvent ponctuellement s’ajouter des espèces de passage.

 

Sur 8 parcs éoliens bretons : 43 espèces à moins de 100 mètres des mâts

Au cours de 36 sorties de terrain, réalisées entre 2012 et 2014 sur 8 parcs éoliens de Bretagne intérieure, nous avons noté, sur une image aérienne, toutes les observations réalisées à proximité des éoliennes. Nous avons ainsi pu établir une liste des espèces observées dans un rayon de 50 mètres et dans un rayon de 100 mètres autour des mâts des éoliennes.

On remarque que 43 espèces ont été observées dans un rayon de 100 mètres et que toutes les espèces communes sont bien représentées, en premier lieu les petits passereaux associés aux cultures (Bergeronnette grise, Pipit farlouse, Alouette des champs, Tarier pâtre), mais aussi ceux qui fréquentent les bois et les haies (Accenteur mouchet, Rougegorge familier, Grives, etc.). Les espèces moins fréquemment notées sont des espèces généralement peu communes en Bretagne (Perdrix grise, Bouvreuil pivoine, Tarier des prés) ou liées à des habitats que l’on retrouve peu autour des éoliennes (milieu forestier pour les Roitelets et la Sittelle, milieux humides pour la Bergeronnette des ruisseaux ou le Héron cendré).

Tableau des espèces observées de 2012 à 2014 dans un rayon de 50 et 100 mètres autour des éoliennes. Remarque : il s’agit ici uniquement d’oiseaux qui ont été observés posés.

Des oiseaux jusque sur les plateformes

La première colonne du tableau témoigne quant à elle de la présence de 26 espèces dans un rayon de 50 mètres autour du mât, ce qui correspond à peu près à la zone survolée par les pales. On est donc là à proximité immédiate de l’éolienne. Certaines espèces comme le Pipit farlouse ou la Bergeronnette grise sont fréquemment observées sur les plateformes des éoliennes, à la recherche de nourriture. Le « record » est détenu par le Pipit farlouse et l’Alouette lulu avec des observations à seulement 10 mètres du mât. On comprend donc à la lecture de ces chiffres que les petits passereaux de milieux agricoles ne sont pas particulièrement effarouchés par la présence des éoliennes.

Le Pipit farlouse : une espèce fréquemment observée à proximité des éoliennes

Effarouchement ou collision ?

Par ailleurs, les études menées en Europe montrent que ces petites espèces sont bien moins sensibles au risque de collision que les espèces de plus grandes envergures telles que les rapaces ou les laridés. Dans notre cas, le fait que la Buse variable ait été notée à 6 reprises dans un rayon de 100 mètres traduit une certaine familiarisation avec les éoliennes, d’où, par ailleurs, un risque de collision.

De manière générale, la mortalité plus élevée des rapaces diurnes (aigles, vautours…) montre que ces oiseaux évoluent fréquemment dans les airs à proximité des éoliennes qui, a priori, les effraient donc peu. La plupart des espèces d’oiseaux semblent donc peu effarouchées par les éoliennes, ce qui semble sans conséquence pour les petits passereaux mais peut s’avérer dangereux pour les rapaces par exemple.

 

Images : Éoliennes, E. Barussaud / Pipit farlouse : Ron Knight

 

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