Comment évaluer l’intérêt écologique d’une haie ?

La prise en compte des continuités écologiques est de plus en plus importante dans les projets d’aménagements. Entre autres fonctions agro-écologiques, la haie est l’élément de base de la trame verte bocagère. Voici quelques critères pour évaluer l’intérêt des haies.

Note : Nous nous basons ici sur les cas que nous rencontrons dans notre région d’intervention, à savoir la Bretagne et les Pays de la Loire. Les espèces et les enjeux ne sont évidemment pas nécessairement les mêmes ailleurs.

1. La haie en elle-même

1.a. Structure

Une haie comportant plusieurs strates remplit davantage de fonctions agro-écologiques qu’une haie formée uniquement d’arbres de même port et même taille. Par exemple, elle protège mieux du vent et du soleil, constitue un meilleur corridor pour la faune, etc. On distingue généralement une strate arborée qui peut atteindre une trentaine de mètres de haut, une strate arbustive (1 à 5 mètres) et une strate basse, herbacées et/ou buissonnante. La présence côte à côte d’arbres jeunes et anciens est aussi un atout : les vieux arbres comportent des cavités et produisent de l’ombre tandis que les jeunes arbres assurent la pérennité de la haie.

haie - trame verte

Haie comportant différentes strates : vieux arbres (chênes), arbustes (prunelliers), strate buissonnante (ajonc) et strate herbacée

1.b. Biodiversité végétale et animale

Si la strate arborée est souvent dominée par deux ou trois espèces sélectionnées – ou du moins favorisées – par l’Homme (Chênes, Hêtre, Châtaigniers…), la diversité est plus forte dans la strate arbustive et surtout dans la strate basse dont la composition varie grandement en fonction de la nature du sol et de l’exposition. Dans la strate arbustive, on trouve généralement dans nos régions Noisetier, Saules, Ajonc d’Europe, Prunellier, Aubépine, Sureau noir, etc. La strate basse peut abriter plusieurs dizaines d’espèces, certaines typiques des sols acides (Vaccinium myrtillus, Teucrium scorodonia, Conopodium majus, Digitalis purpurea, Erica cinerea, Blechnum spicant), d’autres plus « banales », mésophiles, nitrophiles ou rudérales : Dactylis glomerata, Geranium robertianum, Galium aparine, Lapsana communis, Stellaria media, Potentilla erecta, Rumex acetosella, etc.

haie

Haie comportant des arbres de différentes espèces et de différents âges, dont de vieux chênes à cavités (Morbihan)

Concernant la faune présente dans les haies, elle peut être abondante et comporter des espèces à enjeux particuliers : Bruant jaune, Linotte mélodieuse, Muscardin, Hérisson, Lézard vivipare etc. Ces espèces sont protégées ainsi que leurs habitats. La présence de vieux arbres à cavités est favorable à de nombreuses espèces : oiseaux cavernicoles (Chouette hulotte, Gobemouche gris, Mésange bleue…), chiroptères (Sérotine commune, Oreillard roux, Barbastelle d’Europe…) ou encore insectes xylophages (Grand Capricorne, Pique-Prune…)

1.c. Présence d’un talus et d’un fossé

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Vieille haie de Hêtres sur talus (Côtes d’Armor)

Dans les paysages de bocage, il arrive fréquemment que les vieilles haies se trouvent sur un talus, souvent doublé d’un fossé. Ce cas de figure augmente encore l’intérêt écologique de la haie : l’eau circule dans le fossé, des plantes hygrophiles peuvent y apparaître, la micro-faune utilise souvent le talus pour s’y réchauffer (reptiles) ou y creuser des galeries (rongeurs).

 

 

2. La haie dans son environnement

2.a. Connexion aux autres boisements

Une haie reliant deux boisements pourra jouer le rôle de corridor écologique pour la petite faune : batraciens, lézards, petits mammifères, invertébrés… Ce rôle de corridor est d’autant plus important que les vastes parcelles agricoles de monoculture constituent aujourd’hui des milieux défavorable à la circulation de ces animaux.

2.b. Nature des parcelles alentours

La nature des parcelles situées de part et d’autre de la haie conditionne aussi en partie son intérêt écologique. Par exemple, une haie bordant une prairie permanente présentera un intérêt pour le Lézard vivipare ou le Lézard vert occidental. A l’inverse, la présence d’un champ de maïs diminuera l’attrait de la haie pour ces espèces (ombre, insecticides, désherbage). La présence d’une bande enherbée le long d’une haie la rend également plus intéressante pour la biodiversité.

Le Lézard vert occidental recherche des haies ensoleillées avec une végétation basse développée, souvent en bordure de prairie

 

2.c. Fonctions hydrologiques

Les haies jouent également un rôle important dans la régulation hydraulique et pour la qualité de l’eau. Les haies contrôlent en effet le ruissellement, limitent l’érosion et le déversement des polluants (pesticides, phosphates, nitrates) dans les cours d’eau. Ainsi, les haies participent, par une action en amont, au maintien des écosystèmes aquatiques. Cette fonction de protection est particulièrement remplie par les haies perpendiculaires à la pente.

 

Conclusion : proposition d’une méthodologie pour évaluer l’intérêt écologique d’une haie

La valeur écologique d’une haie doit être évaluée d’après plusieurs critères relatifs à la haie elle-même mais aussi à son environnement. Les six critères présentés ci-dessus peuvent, par exemple, être examinés un par un, avec attribution d’une note, 0 ou 1, selon la présence ou l’absence des éléments évoqués. On peut aussi affiner l’analyse en attribuant une notre allant de 1 à 10 pour chaque critère. Le critère « Biodiversité animale et végétale » reste le plus complexe à évaluer car il demande une prospection de terrain à différentes périodes de l’année. Les autres critères peuvent être grossièrement appréhendés à partir d’une image aérienne et d’une carte topographique puis affinés avec une visite sur le terrain.

schéma valeur écologique d'une haie

Images : haies : E. Barussaud / Lézard vert occidental  : Marco Pulidori

 

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  1. […] ou de jeunes pousses dans la nature plutôt que de devoir les acheter. Rappelons enfin que la qualité écologique d’une haie dépend aussi de son environnement immédiat : exposition, milieux adjacents, connexion avec […]

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