Projets photovoltaïques : ce qui change en 2024

Deux décrets sont parus en décembre 2023 et facilitent les projets photovoltaïque.

Le décret n°2023-1366 permet de simplifier la procédure de demande de dérogation « espèces protégées ». Parmi les situations permettant l’octroi d’une telle dérogation figurent les projets présentant un intérêt pour la santé, la sécurité publique ou d’autres raisons d’intérêt public majeur. Les dérogations « espèces protégées » réalisées pour des projets photovoltaïques devaient donc jusqu’ici faire la démonstration de leur « intérêt public majeur ». Le décret du 28 décembre 2023 reconnaît que les projets photovoltaïques « sont réputés répondre à une raison impérative d’intérêt public majeur » sous certaines conditions de puissance (> 2,5 mégawatts crête et < l’objectif maximal de puissance du parc de production photovoltaïque sur ce territoire). Les autres conditions de dérogation persistent, à savoir 1) l’absence de solution plus satisfaisante et 2) la non-atteinte au maintien de l’état de conservation favorable des espèces dans leur aire de répartition naturelle.

L’arrêté du 29 décembre 2023, pris en application du décret n°2023-1408 fixe « les caractéristiques techniques et critères d’implantation des installations de production d’énergie photovoltaïque qui permettent (…) d’être exemptés d’une prise en compte dans le calcul de la consommation des espaces naturels, agricoles et forestiers ». Si un parc photovoltaïque remplit certaines conditions (hauteur des panneaux, espacement entre deux rangées de panneaux, revêtement des voies d’accès…), il peut ne pas être comptabilisé comme une consommation d’espace naturel, agricole ou forestier.

Comment faire une demande de dérogation « espèces protégées » (oiseaux, reptiles, mammifères…)

De nombreuses espèces animales bénéficient en France d’une protection à l’échelle nationale. Toute personne qui souhaite déroger à cette protection légale doit en faire la demande. Le préfet de département peut autoriser ou refuser la dérogation. La demande de dérogation comporte un (ou des) formulaire(s) Cerfa ainsi qu’un dossier. Quel formulaire remplir ? Que doit contenir le dossier ? Voici les réponses, en 4 étapes.

Le cadre législatif

Les articles L411-1 et L411-2 du Code de l’Environnement prévoient la protection de certaines espèces animales « lorsqu’un intérêt scientifique particulier, le rôle essentiel dans l’écosystème ou les nécessités de la préservation du patrimoine naturel justifient [leur] conservation« . Pour ces espèces, la protection ne se limite pas nécessairement aux individus mais concerne également les habitats de ces espèces. Concernant les oiseaux, les nids et les œufs sont également protégés.

Les listes d’espèces animales bénéficiant d’une protection nationale sont définies par les textes suivants :

  • Oiseaux : arrêté du 29 octobre 2009 (modifié le 21 juillet 2015)
  • Reptiles et amphibiens : arrêté du 19 novembre 2007 (modifié le 8 janvier 2021)
  • Mammifères : arrêté du 23 avril 2007 (modifié le 15 septembre 2012 et le 1er mars 2019)
  • Insectes et mollusques : arrêté du 23 avril 2007

Les modalités de demande d’une dérogation sont fixées par l’arrêté du 19 février 2007. L’article 1 de cet arrêté indique que les dérogations sont « délivrées par le préfet du département du lieu de l’opération pour laquelle la dérogation est demandée« .


Étape 1 : identifier les espèces protégées

La première étape consiste à dresser la liste des espèces impactées par votre projet. Il peut s’agir d’une seule espèce. Par exemple : un ravalement de façade impactant des nids d’hirondelles. Si votre projet est de grande ampleur (aménagement d’un quartier, création d’une zone d’activité, etc.), il est nécessaire de faire réaliser un diagnostic par un bureau d’étude : ce dernier dressera la liste complète des espèces protégées présentes sur la zone de votre projet.

Le bureau d’étude cherchera également à collecter le plus d’informations possible sur ces espèces : période de présence, estimation du nombre de couple (oiseaux), localisation précise, habitats utilisés, etc. Ces informations seront présentées dans le dossier qui accompagnera vos formulaires Cerfa. Elles permettront aux services qui instruiront le dossier (DDT, DDTM, DREAL) de comprendre les enjeux présents sur votre site.

Cette étape est à prévoir le plus en amont possible dans votre projet. En effet, les prospections de terrain se déroulent généralement sur plusieurs mois (mars à juin étant la période la plus décisive) voire, en fonction des caractéristiques de votre projet, sur un cycle annuel complet.

Étape 2 : les trois conditions à respecter

D’après l’article L-411-2 4°, pour la délivrance d’une dérogation « espèces protégées », deux conditions doivent être remplies :

  • Il n’existe pas d’autre solution plus satisfaisante
  • La dérogation ne nuit pas au maintien de l’état de conservation favorable des espèces dans leur aire de répartition naturelle

Ce second point doit être démontré dans votre dossier. C’est pourquoi une analyse solide des enjeux et des impacts doit y figurer.

Par ailleurs, votre projet doit correspondre à l’une des cinq situations suivantes :

  • comporter un intérêt pour la protection de la faune et de la flore sauvage
  • prévenir des dommages importants aux cultures, à l’élevage, etc.
  • présenter un intérêt pour la santé, la sécurité publique ou d’autres raisons d’intérêt public majeur
  • avoir des fins de recherche, d’éducation ou de repeuplement / réintroduction d’espèces
  • permettre, dans des conditions strictement contrôlées, d’une manière sélective et dans une mesure limitée, la prise ou la détention de certains spécimens

Dans le cas d’une opération d’aménagement (route, zone d’activité, etc.), c’est le troisième point, à savoir la « raison d’intérêt public majeur« , qui sera invoqué.

Étape 3 : évaluer les impacts et prévoir des mesures ERC

Une évaluation des impacts consiste à prévoir la destructions d’individus ou d’habitats qui pourraient avoir lieu :

  • lors de la phase de chantier : la destruction de nichées d’oiseaux lors du défrichage en est un exemple
  • lors de la phase dite « d’exploitation » : il s’agit d’effets sur le long terme comme la disparition d’une mare, la pollution lumineuse liée à l’éclairage publique ou encore le dérangement de la faune liée à une augmentation de la fréquentation du site

Il s’agit donc de donner aux services instructeurs une vision claire de l’impact de votre projet sur les différentes espèces protégées.

Une fois les risques identifiés, des mesures d’évitement, de réduction et, en dernier lieu, de compensation, doivent être prévues et précisément décrite dans votre dossier. L’objectif est aussi de démontrer que votre projet ne nuit pas au maintien de l’état de conservation favorable des espèces protégées.

Étape 4 : remplir les formulaires Cerfa

Enfin, une fois votre dossier réalisé, vous devez lui adjoindre les formulaires Cerfa adaptés. Par exemple :

Ces formulaires résument votre demande, c’est pourquoi nous vous conseillons de les remplir une fois votre dossier de demande terminé.

En Bretagne, votre demande doit être adressée, dans la majorité des cas, à la DDTM du département où se situe votre projet. Voir ici.

Le CSRPN (Conseil scientifique régional du patrimoine naturel) ou le CNPN (Conseil national pour la protection de la nature) peuvent être saisis afin d’émettre un avis sur votre dossier. Ces instances peuvent donner un avis favorable, favorable sous conditions ou défavorable.

En dernier lieu, le préfet décide d’accorder ou non l’autorisation par arrêté préfectoral.


Une nouvelle Liste Rouge des oiseaux d’Europe (2021)

Six ans après sa dernière version (2015), la Liste Rouge des oiseaux d’Europe vient d’être mise à jour. Le document, publié par BirdLife International, évalue l’état de conservation de 544 espèces. Vous pouvez télécharger le document complet ici.

Les espèces menacées constituent 13 % du total

Parmi les 544 espèces évaluées, on trouve 8 espèces « en danger critique » d’extinction, 15 espèces « en danger » et 48 espèces « vulnérables ». Ces trois catégories constituent le groupe des espèces dites « menacées ». Ce dernier, avec 71 espèces, représente donc 13 % du total. Par ailleurs, 34 espèces, soit 6 % du total, sont considérées comme « quasi-menacées ».

En proportion, il y a donc toujours beaucoup moins d’espèces menacées à l’échelle de l’Europe (13 %) qu’à l’échelle de la France (32 %). L’article que nous avions rédigé il y a deux ans, « Espèces menacées : une question d’échelle » reste donc d’actualité.

Parmi les espèces menacées et quasi-menacées, on trouve en premier lieu des espèces liées aux « terres agricoles et prairies » : 33 espèces dont le Corbeau freux et la Caille des blés. Suivent les espèces marines (28 espèces dont l’Eider à duvet) et les espèces liées aux zones humides de l’intérieur des terres (13 espèces dont le Grèbe à cou noir).

Disparition du Turnix et du Syrrhapte

Certaines espèces, considérées comme menacée en 2015, sont désormais éteintes en Europe. C’est notamment le cas du Turnix d’Andalousie (Turnix sylvaticus), espèce par ailleurs présente en Afrique et dans le sud de l’Asie, et du Syrrhapte paradoxal (Syrrhaptes paradoxus), espèce nichant en Asie centrale.

Le Syrrhapte paradoxal fait désormais partie des espèces éteintes en Europe (photo : Tomju48 — Travail personnel, CC BY-SA 3.0, https://commons.wikimedia.org/w/index.php?curid=16362448)

Du mieux pour le Martin-pêcheur et la Barge à queue noire

Certaines espèces voient leur situation s’améliorer. C’est par exemple le cas du Martin-pêcheur d’Europe qui passe de « vulnérable » à « préoccupation mineure », c’est à dire non menacé. La Barge à queue noire et le Courlis cendré, passent de « vulnérable » à « quasi-menacé » tandis que l’Aigle criard passe de « en danger » à « vulnérable ».


photo en une de l’article : Fuligule milouin, photo E.Barussaud

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